En savoir plus – Les particules mystérieuses – Historique

La décennie des rayons cosmiques : une poussée décisive pour l’observatoire

Jean Rösch, directeur de l’Observatoire du Pic du Midi de 1947 à 1983, évoque en ces termes la dynamique des « cosmiciens » qui a permis le développement fulgurant et décisif de l’observatoire à la sortie de la seconde guerre mondiale.

« Ce n’était là que la poussée initiale qui a lancé la ‘boule de neige’. Mais sans cela, elle ne se serait peut-être jamais formée. »

L’apogée des observatoires d’altitude

A la fin des années 1940, on s’intéresse aux rayons cosmiques parce qu’ils sont alors le seul moyen d’étudier des particules de haute énergie. Ils ont également la faculté de faire éclater des noyaux atomiques. Les rayons cosmiques permettent ainsi de faire de la physique des particules.
L’observation de ces particules est idéale depuis un laboratoire situé en altitude parce que les rayons cosmiques s’atténuent au fur et à mesure qu’ils pénètrent plus bas dans l’atmosphère.

Dans les années 1950, les rayons cosmiques deviennent ainsi la principale raison d’être de la plupart des laboratoires d’altitude dans le monde. Ils profitent alors des crédits importants consacrés à ce thème de recherche. Cette manne scientifique et financière profitera à l’observatoire du Pic du Midi grâce à la politique volontariste de Jean Rösch.

Les cosmiciens au sommet et à Bagnères de Bigorre

Deux familles de cosmiciens vont choisir de s’installer au Pic à partir de 1947 jusqu’à la fin des années 1950.

Les cosmiciens à la recherche des origines des particules cosmiques : ceux sont les premiers à s’installer au Pic dès 1947. Ils s’intéressent au propriétés des rayons cosmiques et veulent déterminer leur origine qui est encore inconnue à l’époque. On compte parmi eux Pierre AugerJean Daudin et André Cachon. Ce sont eux qui resteront le plus longtemps au Pic bien que leurs ressources soient plus modestes que celles des physiciens des particules. Ils feront de nombreuses découvertes fondamentales. Notamment Daudin qui observe l’accroissement de l’intensité des rayons cosmiques de grande énergie lorsque la Voie Lactée passe au zénith.

Célébration de la découverte d’une particule élémentaire au Pic en août 1953. Assis de gauche à droite : Un cosmicien, Jean Rösch, Jean Daudin et l’ingénieur Quénard

Les physiciens des particules : ce second groupe fait son apparition en même temps que le courant électrique nécessaire à ses lourdes expériences. Ces chercheurs utilisent les rayons cosmiques pour étudier la structure fine de la matière et examinent les collisions de ces particules très énergétiques. Ils bénéficient du soutien inconditionnel des instances dirigeantes de la science. Dans ce groupe, deux équipes se distinguent.

L’équipe de Manchester dirigée par Patrick Blackett. Ces cosmiciens cherchent à découvrir des particules inconnues en les photographiant dans une chambre de Wilson (chambre à brouillard) placée dans l’entrefer d’un puissant électro-aimant qui incurve la trajectoire des particules chargées. En mesurant la courbure de cette trajectoire, il est possible de déterminer l’énergie des particules. Patrick Blackett choisit le Pic du Midi pour installer son expérience car l’observatoire se dote des infrastructures indispensables (ligne haute tension en 1947 et funiculaire en 1949) à l’acheminement et au fonctionnement de son électro-aimant de 11 tonnes baptisé « Joséphine ».

Arrivée de l’électro-aimant « Joséphine » à l’observatoire le 22 octobre 1949.

L’autre groupe est celui de l’équipe de l’Ecole polytechnique dirigée par Louis Leprince-Ringuet. Ces chercheurs installent un dispositif plus complexe et puissant que l’équipe de Manchester afin d’approfondir leurs observations. Deux chambres à brouillard géantes sont ainsi placées au centre d’un intense champ magnétique. D’après Louis Leprince-Ringuet, c’était à l’époque « la plus importante installation de ce genre dans le monde ». L’équipe de polytechnique découvre qu’il y a bien plus que les protons, les électrons et les neutrons dans la matière subatomique. Ils mettent en évidence plusieurs types de mésons et des hypérons.

Les physiciens des particules accueillis par Bernard Lyon en 1936. De gauche à droite sur la photo : Bernard Lyot, Louis Leprince-Ringuet, Madame Lyot, un cosmicien et Pierre Auger.

Le congrès international de Bagnères de Bigorre : Les découvertes et les progrès rapides du Pic du Midi dans la science des rayons cosmiques motivent l’idée d’un congrès international à Bagnères de Bigorre. Le congrès se tient du 6 au 12 juillet 1953. Tous les grands cosmiciens de la planète sont au rendez-vous, on compte près de 200 participants dont de nombreux prix Nobel. Le congrès permettra la conception d’une nomenclature des particules cosmiques. La particule « V » observée au Pic du Midi y est baptisée « hypéron ».

En 1978, à l’occasion du centenaire de l’observatoire, un monument est inauguré pour célébrer cette découverte. Cette statue de la trace de l’hypéron, peu à peu oubliée localement, trône à proximité du Musée Salies de Bagnères de Bigorre.

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Photographie de la particule V dans la chambre de Wilson du Pic du Midi. Elle sera baptisée Hyperon au Congrès de Bagnères en 1953.

Inauguration du Monument Hypéron en 1978 à Bagnères de Bigorre.

Inauguration Boulevard de l’Hypéron à Bagnères de Bigorre en 1978.

« C’est peut-être le seul endroit au monde où une particule fondamentale a donné un nom à une avenue » Louis Leprince-Ringuet (1983)

La transformation de l’observatoire

La décennie des cosmiciens est une intense période de développement et de modernisation de l’infrastructure de l’observatoire. Une succession de nouveaux moyens technologiques et logistiques propulse le Pic dans une nouvelle ère.

Le funiculaire

Installation construite en 1949 pour permettre d’acheminer l’électro-aimant de l’équipe de Manchester.

La nouvelle ligne électrique

L’installation de la ligne haute tension s’est déroulée de 1947 à 1949 pour alimenter les puissants électro-aimants des cosmiciens. Elle est mise en service le 18 novembre 1949. C’est alors l’euphorie du libre usage du courant électrique, jusque-là si parcimonieusement utilisé.

Le Téléphérique

C’est la réussite de l’implantation de Patrick Blackett au Pic qui décide le Ministère de l’Enseignement Supérieur d’installer le téléphérique. Les crédits sont accordés en janvier 1950. Deux années seront nécessaires à la construction des deux téléphériques. Le tronçon Mongie-Taoulet est achevé le 23 décembre 1951, celui du Pic le 15 aout 1952.

La cabine téléphérique de l’observatoire arrivant en gare du Taoulet.

Le grand atelier :

Le besoin d’énergie des physiciens de l’Ecole Polytechnique est tel que le Pic est excavé sur une dizaine de mètres sous la terrasse principale pour y installer un poste de transformation électrique. Au total, 2500 m3 de roches seront extraits après deux ans de travaux. Les volumes restants permettent la construction d’ateliers sur trois étages.

Hotel d’altitude et nouvel observatoire

Les moyens et commodités allant croissant, l’observatoire ne tarde pas à attirer d’avantage de monde. Pour accueillir cette nouvelle fréquentation, un hotel d’altitude (le bâtiment Labardens) est construit côté sud, il compte près d’une trentaine de chambres. L’observatoire est également étendu à l’est avec le bâtiment du Pas de Case pour anticiper l’installation d’une nouvelle coupole astronomique.

Le Pic en 1953 lors de l’excavation du grand atelier (au centre de l’image). A droite le bâtiment Pas de Case et sa tour devant accueillir un instrument astronomique.

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