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L’étude du rayonnement cosmique aujourd’hui

À partir des années 1950, les physiciens des particules ont développé leurs propres outils dédiés à la physique subatomique, les accélérateurs de particules, tandis que l’étude du rayonnement cosmique s’est orientée essentiellement vers la recherche de l’origine de ce rayonnement, donc une problématique astrophysique.

Aujourd’hui, la question des sources de production du rayonnement cosmique constitue toujours une thématique de recherche d’actualité car dans une large mesure, il s’agit d’un problème non résolu, en particulier pour les ultra hautes énergies.

La recherche des sources du rayonnement cosmique se divise en deux grands types de stratégies :

  • 1 – La détection de particules neutres émises sur les lieux de production du rayonnement cosmique et dont la direction d’arrivée pointe directement vers ces sources (photons gamma et neutrinos).
  • 2 – La détection des particules chargées dont l’énergie est si élevée (particules d’ultra haute énergie) qu’elles ne sont pas (ou peu) déviées par les champs magnétiques présents dans notre galaxie.

Dans les deux cas, ce sont les interactions de ces particules avec notre planète (de l’atmosphère au noyau terrestre) que les instruments vont chercher à détecter.

L’astronomie gamma

Lorsque les photons gamma pénètrent dans l’atmosphère, ils créent une gerbe électromagnétique composée de photons et d’électrons. Lors de leur traversée de l’atmosphère, ces particules se propagent plus vite que la vitesse de la lumière dans l’air et créent un rayonnement Tcherenkov dans le bleu et le proche ultraviolet. C’est ce rayonnement que cherchent à observer les télescopes gamma localisés au sol. Si plusieurs d’entre eux observent simultanément ce rayonnement, ils peuvent produire une vue stéréoscopique de la gerbe et ainsi déterminer son énergie globale (donc celle du photon gamma incident) ainsi que sa direction.

En accumulant plusieurs observations de ce rayonnement, il est donc possible de réaliser des images d’objets astrophysique en gamma. C’est le principe de l’Observatoire HESS localisé en Namibie qui compte 5 télescopes, et c’est également le principe de l’observatoire CTA en cours de construction et qui comptera plusieurs dizaines de télescopes localisés sur deux sites :

  • dans l’hémisphère Nord (archipel des Canaries) ;
  • dans l’hémisphère Sud (sur le plateau de l’Atacama au Chili).

Avec HESS, les scientifiques ont observé plusieurs vestiges de supernovæ qui constituent des candidats sérieux comme source de production des rayons cosmiques à des énergies inférieures à 1 015 eV.

Figure 1 – L’observatoire HESS est constitué de 5 télescopes en Namibie. (Crédits : HESS Collaboration).

L’astronomie des neutrinos

Les neutrinos interagissent très peu avec la matière, leur trajet n’est pas perturbé depuis le lieu de leur émission et leur détection renseigne donc directement sur la localisation et la nature de la source. Lors des rares interactions des neutrinos avec la matière, ils se désintègrent notamment en muons, qui sont eux plus facilement détectables.

La stratégie utilisée par les télescopes à neutrinos actuels consiste à utiliser l’épaisseur de la planète comme cible d’interaction entre les neutrinos et la matière et à se positionner de l’autre côté de la planète dans un volume de matière à travers lequel les muons produits seront facilement détectables : par exemple, la glace au Pôle Sud pour l’observatoire IceCube, ou l’eau dans la Mer Méditerranée pour ANTARES et son successeur KM3NeT.

Dans les deux cas, des centaines de photomultiplicateurs sont disposés le long de lignes dans des volumes de l’ordre du km<sup>3</sup> pour capter la lumière émise par les muons lors de leur interaction avec la glace ou l’eau par rayonnement Tcherenkov.

Pour l’instant, une vingtaine de neutrinos provenant de sources astrophysiques ont été détectés par IceCube donc provenant du ciel de l’hémisphère nord. Les sources n’ont pas encore été identifiées. Pour y parvenir, ces observatoires travaillent désormais conjointement avec des télescopes optiques pour réussir à « voir » ces sources.

Figure 2 – Vue d’artiste du projet KM3NET dont l’objectif est de détecter les neutrinos cosmiques. Des détecteurs optiques sont disposées le long d’une centaine de ligne sur 2 sites en Méditerranée (un au large de La Seyne sur mer et l’autre au large de Capo Passero en Sicile). Ces détecteurs sont conçus pour voir le passage de muons issus de la désintégration de neutrinos.

Les rayons cosmiques d’ultra haute énergie

Les grandes gerbes atmosphériques produites par les rayons cosmiques d’ultra haute énergie (supérieure à 1 019 eV) lors de leur interaction avec l’atmosphère permettent d’envisager des techniques de détection. Leur rareté (au moins d’1 particule par km² et par siècle) nécessite de couvrir de très grandes surfaces pour espérer en observer.

L’Observatoire Pierre Auger couvre ainsi une surface de 3 000 km² dans la Pampa Argentine. Il est constitué de milliers de cuves d’eau régulièrement réparties sur cette surface, qui permettent de détecter par effet Tcherenkov les muons créés dans les gerbes.

Par ailleurs, des télescopes sont utilisés pour détecter le rayonnement émis par la fluorescence de l’azote de l’air provoquée par l’excitation de ces atomes lors du passage de la gerbe.

Ces deux techniques sont complémentaires :

  • les cuves à eau permettent de mesurer le profil latéral de la gerbe.
  • les télescopes ont pour but de mesurer le profil longitudinal de la gerbe.

La combinaison de ces deux techniques a pour objectif de reconstruire la gerbe pour en déterminer l’énergie et la direction. Ces caractéristiques permettent de déterminer la nature du rayon cosmique primaire.

Figure 3 – Schéma de principe de l’Observatoire Pierre Auger, localisé en Argentine, pour détecter les gerbes produites par les rayons cosmiques d’ultra haute énergie.

Enfin, l’expérience AMS localisée sur la station spatiale internationale a détecté un excès d’antimatière (positrons). Si plusieurs hypothèses sont proposées (pulsar, annihilation de matière noire), aucune d’entre elles ne s’est avérée convaincante.

Colour composite image of Centaurus A, revealing the lobes and jets emanating from the active galaxy’s central black hole. This is a composite of images obtained with three instruments, operating at very different wavelengths. The 870-micron submillimetre data, from LABOCA on APEX, are shown in orange. X-ray data from the Chandra X-ray Observatory are shown in blue. Visible light data from the Wide Field Imager (WFI) on the MPG/ESO 2.2 m telescope located at La Silla, Chile, show the stars and the galaxy’s characteristic dust lane in close to « true colour ». #L

Figure 4 – Image composite de Centaurus A, le noyau actif de galaxie le plus proche de la Terre (environ 12 millions d’années-lumière). Les rayons cosmiques d’ultra haute énergie pourraient provenir de ce type d’objets, accélérés notamment par les jets visibles sur cette image composite (crédits : ESO/WFI (Optique) ; MPIfR/ESO/APEX/A.Weiss et al. (Submillimétrique); NASA/CXC/CfA/R.Kraf et al. (rayons X)).

Source texte et images : Cyrille Baudouin, https://eperon.omp.eu/

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